jeudi 7 mai 2020

La fin du confinement français arriverait-il ?


La nuit du 8 au 9 janvier 2020, alors que nous étions restés dormir sur le parking près du centre commercial, j'avais passé une nuit blanche. Le bruit était assourdissant : entre celui des trains passant sur la voie de chemin de fer, certainement proche, le moteur des camions, celui des camping-cars prenant la route. Peut-être, aussi, avais-je peur de ne pas me réveiller ? Pourtant, nous avions le temps puisque nous allions embarquer à 11 heures. À 9 heures 30, nous étions sur le quai d'embarquement. Des dizaines et des dizaines de camping-cars attendaient à touche-touche l'autorisation de franchir la ligne face au quai. 

Un hélicoptère, à basse altitude, survolait les parkings. Étions-nous surveillés ? Un agent de la compagnie passait entre les véhicules, relevait les numéros d'immatriculation et prenait tous les passeports pour gagner un peu de temps. Il y avait tellement de touristes, plus que l'année précédente, il paraissait. Je m'inquiétais, car le temps s'écoulait et nos passeports ne revenaient toujours pas. Juste le temps d'y penser et l'agent revenait en remettant chaque passeport à chaque personne concernée qui devait être devant son véhicule. Un navire accostait. De nombreux touristes, tout près du bord du quai, immortalisaient en le photographiant pour certains, en le filmant pour d'autres. Lorsque le mastodonte s'était approché, j'avais l'impression que le godet d'un énorme tractopelle s'ouvrait, l'immense porte actionnée par d'énormes vérins couinant descendait dans un bruit assourdissant de ferraille. Du pont, grand ouvert, se déversaient des camions, puis des automobiles. Autant qu'ils en monteraient, vu la file d'attente.


Le cône devant le premier véhicule a été enlevé par un agent portuaire, les moteurs vrombissaient, les chauffeurs de camions manœuvraient pour entrer dans la gueule du géant en marche arrière. Nous roulions en file indienne, c'est que lorsque tous les gros véhicules ont été rangés et moteurs coupés, qu'une rampe remontait. Une ouverte géante était face à moi. C'était par cette obliquité vertigineuse que nous allions descendre avec le camping-car dans le second sous-sol du colosse.

Une fois garés, nous devions descendre du véhicule pour grimper, grimper, et encore grimper plusieurs volées d'escaliers abruptes. 

Et, nous attendions très longuement. Nous devions partir à 11 heures. À plus de midi nous étions encore à quai sans connaître le motif. Nous apprenions, enfin, qu'un camping-car était en panne de démarreur en plein milieu de la rampe d'accès. Sincèrement, je plaignais le chauffeur.
J'entendais le vrombissement du moteur du bateau, j'étais légèrement brimbalée. Nous quittions le quai, je m'éloignais de la belle côte espagnole. Je m'éloignais de l'Europe en passant y revenir courant mars prochain. 

Vers 13 h 30, la côte africaine était en vue. Le commandant du vaisseau manœuvrait pour entrer au port. J'entendais les grincements des portes. J'imaginais sans peine la gueule du godet s'entrouvrir. Un léger choc me déséquilibrait lorsque le pont a frappé le quai marocain.
Nous dévalions les escaliers à vive-allure, les chauffeurs de camions avaient déjà tourné la clef de contact. Nous devions attendre que tous ces lourds véhicules soient sur la terre ferme. Notre tour suivrait, mais pas tout de suite, en ce qui me concernait, compte tenu, de l'emplacement où nous étions garés (dans l'angle, entre la rampe de sortie et la cloison, juste à côté de l'ouverture). Il nous fallait attendre...
Je n'étais pas fière lorsque Phil conduisait notre camping-car sur la rampe, presque verticale, qui nous emmenait vers le ciel. Le soleil m'éblouissait dès que nous étions sur le parking. Et comme l'année précédente : contrôle de passeports, édition d'une carte grise nous autorisant à rouler sur le territoire marocain, douane, police.... Toutefois, cette année, les contrôles étaient plus rapide, nous étions si nombreux ! Il en n'était pas de même pour les véhicules de touristes chargés sur le toit outre mesure. Comme je l'avais déjà décrit dans mon précédent livre, tout le matériel indescriptible était étalé sur le sol. C'était vraiment impressionnant ce que les marocains ramènent dans leur pays.
Phil et moi sommes passés au guichet de change. Le monsieur était très sympathique, non seulement il n'y avait pas de frais commission, mais en plus, il nous offrait des bonbons !
Il était déjà 15 heures, nous avons grignoté sur le parking avant de prendre la route en direction d'Asilah par l'autoroute. Je me souvenais trop que les routes secondaires étaient en très mauvais états.
À Asilah, dans ce joli village bleu que nous avons traversé, je me reconnaissais. Tout au bout du boulevard, tout près de la jetée, 2 campings se touchaient. Nous nous sommes arrêtés au second : le camping Assaada. D'après le guide Gandini, c'est le mieux des deux !

Mais ce camping était complet, nous avons trouvé, tout de même, une place près de l'entrée, le long du mur des bungalows à louer. Cela me convenait car nous n'avions pas la promiscuité des autres et je captais très bien la wifi.
Une fois installée, nous avons été vers la boutique Maroc Télécom qui se situe presque en face. Ouille, il y avait un monde ! Pourtant je devais prendre patience et attendre plus de 2 heures. Je soufflais un peu lorsqu'un couple d'italiens entrait, il semblait pour la seconde fois, pour demander des explications, en passant devant tout le monde. Mais, comme les autres touristes, je ne disais rien : nous n'étions pas en France ! Chez moi, j'étais certaine qu'ils seraient fait jeter dehors.
Nous étions en place, j'avais le code wifi du camping et la carte sim marocaine dans le téléphone. Nous étions parés pour l'aventure. Aventure que vous avez suivi jusqu'à aujourd'hui.

Que choisir a répondu à mon courrier et m'indique que la compagnie maritime suit les directives du gouvernement du Maroc qui n'autorise pas le transport de passagers et ce jusqu'au 31 mai. Tant qu'à l'attitude de la compagnie GNV, l'association "Que choisir" me conseille d'envoyer la même réclamation au consulat d'Italie à Casablanca, ce que je vais m'empresser de faire. J'ai bien retenu la date du 31 mai, mais ce n'est pas pour cela que les navigations vers Algéciras reprendront car l'Espagne a dit qu'elle fermait ses frontières jusqu'à l'automne !

Je viens de regarder le discours du premier Ministre et des ministres l'entourant. La France va commencer, lentement, son dé-confinement le 11 mai. Nous espérons que nous pourrons regagner notre domicile sans trop de difficulté, avec une attestation spéciale... Déjà il faudra que le bateau soit au rendez-vous le 13 juin à Tanger !

"Heureux le voyageur que sa ville chérie
Voit rentrer dans le port, aux premiers feux du jour !
Qui salue à la fois le ciel et la patrie,
La vie et le bonheur, le soleil et l’amour !

Regardez, compagnons, un navire s’avance.
La mer, qui l’emporta, le rapporte en cadence,
En écumant sous lui, comme un hardi coursier,
Qui, tout en se cabrant, sent son vieux cavalier.

Salut ! qui que tu sois, toi dont la blanche voile
De ce large horizon accourt en palpitant !
Heureux ! quand tu reviens, si ton errante étoile
T’a fait aimer la rive ! heureux si l’on t’attend !

D’où viens-tu, beau navire ? à quel lointain rivage,
Léviathan superbe, as-tu lavé tes flancs ?
Es-tu blessé, guerrier ? Viens-tu d’un long voyage ?
C’est une chose à voir, quand tout un équipage,
Monté jeune à la mer, revient en cheveux blancs.
Es-tu riche ? viens-tu de l’Inde ou du Mexique ?
Ta quille est-elle lourde, ou si les vents du nord
T’ont pris, pour ta rançon, le poids de ton trésor ?
As-tu bravé la foudre et passé le tropique ?
T’es-tu, pendant deux ans, promené sur la mort,
Couvrant d’un œil hagard ta boussole tremblante,
Pour qu’une Européenne, une pâle indolente,
Puisse embaumer son bain des parfums du sérail
Et froisser dans la valse un collier de corail ?

Comme le cœur bondit quand la terre natale,
Au moment du retour, commence à s’approcher,
Et du vaste Océan sort avec son clocher !
Et quel tourment divin dans ce court intervalle,
Où l’on sent qu’elle arrive et qu’on va la toucher !

Ô patrie ! ô patrie ! ineffable mystère !
Mot sublime et terrible ! inconcevable amour !
L’homme n’est-il donc né que pour un coin de terre,
Pour y bâtir son nid, et pour y vivre un jour ?"

Le Havre, septembre 1855.
Alfred de Musset, Œuvres posthumes, 1888

Le nombre d'infection au coronavirus augmente de 5.382 à 5.505 en 24 heures. L'écart entre le nombre de décès qui passe de 182 à 183 et celui de personnes guéries passées de 1.969 à 2.124 se creuse toujours.

Aujourd'hui, il fait encore chaud, nous avons pu emprunter un appareil de climatisation. Le thermomètre affiche :
À l'abri, à l'heure marocaine (heure du soleil)

Au soleil
Prenez soin de vous.

À demain pour la suite de l'aventure !

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